Rafah est la seule porte d’accès directe menant à la bande de Gaza depuis l’Egypte, qui a rappelé n’avoir jamais fermé le poste-frontière de son côté. Le contrôle militaire exercé par Israël en a néanmoins empêché le fonctionnement normal, en contradiction avec le plan de Donald Trump et entériné par les Nations unies.
Une source égyptienne bien informée a démenti les informations relayées par certains médias israéliens, selon lesquelles une coordination aurait eu lieu avec Israël en vue de l’ouverture du poste-frontière de Rafah « pour la sortie de Gaza » vers l'Egypte, selon l’Organisme général de l’information cité par Al Qahera News mercredi 3 décembre.
L'Organisme général de l’information précise que « si un accord venait à être conclu sur cette ouverture, la circulation serait rétablie dans les deux sens, permettant l’entrée et la sortie de la bande de Gaza, conformément au plan proposé par le président Donald Trump ».
Le président de l’Organisme général de l’information, Diaa Rashwan, a confirmé ce mercredi à Al Qahera News qu' « Israël sait parfaitement que le plan de Trump exige de ne pas forcer les Palestiniens à quitter leur terre à Gaza ». « L’Egypte réaffirme son rejet total de tout déplacement des Palestiniens de leurs terres », a-t-il ajouté.
Plus tôt ce mercredi 3 décembre, Israël a annoncé que des habitants de la bande de Gaza pourraient quitter le territoire vers l'Egypte « dans les prochains jours », en application d'une mesure prévue par le plan de paix américain pour Gaza.
« Conformément à l'accord de cessez-le-feu et à une directive de l'échelon politique, le passage de Rafah ouvrira dans les prochains jours exclusivement pour la sortie des résidents de la bande de Gaza vers l'Egypte », a indiqué à l'AFP le Cogat, l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens.
Le Cogat a précisé que l'ouverture du point de passage se ferait en coordination avec l'Egypte et l'Union européenne. Sollicitée par l'AFP, la responsable de la mission européenne pour ce point de passage n'a pas répondu.
Diaa Rashwan : « Un tel type de coordination n’a pas eu lieu et n’aura pas lieu »
Dans des déclarations à la chaîne Al Qahera News, le président de l’Organisme général de l’information, Diaa Rashwan, a affirmé que « la position de l’Egypte n’est pas nouvelle ». Le président Abdel Fattah Al-Sissi a souligné dès le premier jour de la guerre à Gaza, l’existence de deux lignes rouges pour l’Egypte. La première est le refus absolu de tout déplacement des Palestiniens, qu’il soit volontaire ou forcé, qui constituerait une liquidation de la cause palestinienne ; la seconde est le rejet de toute menace à la sécurité nationale égyptienne.
Diaa Rashwan a expliqué que depuis le début de la guerre, le côté égyptien du passage est resté ouvert, y compris pour permettre le retour à Gaza des Palestiniens bloqués en Egypte. « Ensuite, Israël a fermé unilatéralement le point de passage avant de le détruire du côté palestinien », a indiqué Diaa Rashwan.
« Durant toute cette période, et jusqu’à la présentation du plan du président américain Donald Trump, médié par l’Egypte, le Qatar, la Turquie et les Etats-Unis, la position égyptienne est restée inchangée », a assuré Diaa Rashwan.
Rashwan a ajouté que, selon l’article 12 du plan Trump, aucun habitant de Gaza ne peut être contraint de quitter le territoire et, « même s’il en sort volontairement, il conserve le droit d’y revenir. Ce principe s’applique également à toute ouverture du passage du côté égyptien », a déclaré Rashwan.
Le président de l’Organisme général de l’information a insisté sur le fait que la partie israélienne ne détient pas ce pouvoir (ndlr : l’ouverture et la fermeture du passage) et n’a jamais coordonné, de quelque manière que ce soit, avec l’Egypte à propos des informations relayées par les médias israéliens.
Rafah, entre ouvertures et fermetures
Rafah est la seule porte d’accès directe menant à la bande de Gaza depuis l’Egypte, qui a rappelé n’avoir jamais fermé le poste-frontière de son côté. Le contrôle militaire exercé par Israël en a néanmoins empêché le fonctionnement normal, en contradiction avec le plan proposé par l’administration Trump et entériné par les Nations unies.
Côté israélien, il avait rouvert brièvement en janvier 2025, lors d'une précédente trêve de deux mois, d'abord pour laisser sortir certains habitants autorisés à quitter Gaza, principalement pour raisons médicales, puis ensuite pour faire entrer des camions d'aide.
Malgré l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu en octobre, Israël refusait de rouvrir Rafah (du côté palestinien) utilisant le prétexte d’un retard de la remise des dépouilles par le Hamas.
Le point de passage de Rafah, côté palestinien, devait rouvrir le jeudi 16 octobre sous supervision de la Mission d’assistance frontalière de l’Union européenne.
Le 21 novembre, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé que le point de passage de Rafah « ne serait ouvert que pour la sortie », appelant l’Egypte à permettre aux habitants de Gaza de quitter le territoire, selon la chaîne Al-Arabiya Al-Hadath.
Israël contrôle le côté palestinien du poste-frontière depuis le 7 mai 2024 et bloque depuis lors l’acheminement de l’aide humanitaire, provoquant une aggravation de la crise pour les 2,4 millions d’habitants de Gaza.
Malgré ces blocages, les convois humanitaires ont essayé de passer par Rafah depuis juillet 2025, mais ont été redirigés vers les postes de Karm Abou Salem et d’Al-Awguia pour pouvoir entrer dans l’enclave.
A plusieurs reprises, Le Caire a dénoncé les accusations affirmant que l’Egypte contribuerait au blocus. Dans un communiqué publié le 24 juillet, le ministère égyptien des Affaires étrangères a fustigé une « campagne malveillante » visant à dénigrer son rôle dans le soutien à la cause palestinienne.
Il a qualifié d’« injustifiées », « superficielles » et « illogiques » les allégations selon lesquelles l’Egypte empêcherait l’entrée de l’aide. Ces accusations, selon le ministère, ignorent les efforts continus du pays depuis le début de l’agression israélienne et font partie d’une guerre psychologique destinée à semer la division au sein du monde arabe. L’Egypte affirme poursuivre ses efforts pour acheminer l’aide et contribuer à la reconstruction de Gaza.
L’Egypte insiste sur le fait que le passage de Rafah n’a jamais été fermé aux aides humanitaires et qu’elle continue d’envoyer entre 150 et 200 camions par jour, même si les restrictions israéliennes limitent le déchargement à 70 ou 90 camions quotidiens.
Des sources ont indiqué à Al Qahera News mercredi que l’ouverture du point de passage de Rafah dans un seul sens, entre l’Egypte et la bande de Gaza, « contribuerait à consacrer un processus de déplacement forcé des Palestiniens de leurs terres, dans un contexte d’escalade israélienne persistante dans le territoire ».
Les mêmes sources ont souligné que l’Egypte reste pleinement engagée à respecter toutes les dispositions de l’accord de cessez-le-feu à Gaza, y compris le fonctionnement du passage de Rafah dans les deux sens. Elles ont précisé que cela inclut également l’accueil des blessés et des personnes gravement touchées afin qu’ils puissent recevoir des soins sur le sol égyptien.
Accueil des blessés, détenus et exilés : l’Egypte en première ligne
Au-delà de la gestion du poste-frontière, l’Egypte joue un rôle crucial dans la prise en charge des blessés, des malades et des Palestiniens libérés dans le cadre d’accords de cessez-le-feu.
Depuis novembre 2023, 7 277 patients en provenance de Gaza ont été accueillis dans 172 hôpitaux égyptiens, selon le ministre de la Santé Khaled Abdel Ghaffar.
Parmi eux, 1 057 restent en traitement et près de 3 000 opérations chirurgicales majeures ont été effectuées. Plus de 18 000 doses de vaccins — dont 13 265 pour des enfants — ont été administrées.
Le ministère prépare désormais des plans pour renforcer les stocks médicaux et améliorer les capacités des équipes soignantes en prévision de nouvelles vagues de patients.
D’après les Nations Unies, au moins 16 500 patients à Gaza ont besoin de soins médicaux hors de l’enclave. Certains Gazaouis ont réussi à se rendre à l’étranger pour se faire soigner via Israël.
Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu en octobre dernier, Israël maintient son siège autour de Rafah, bloquant l’accès dans les deux sens sous prétexte que le Hamas devrait respecter l’accord et libérer tous les otages encore détenus à Gaza, vivants et décédés.
En outre, 154 Palestiniens ont été libérés et transférés en Egypte fin octobre. Ils sont provisoirement hébergés dans un hôtel du Caire.
Alors que la guerre a causé des milliers de morts, détruit les infrastructures et précipité Gaza dans une famine sans précédent, l’Egypte affirme maintenir son engagement humanitaire et continuer à soutenir la population palestinienne malgré les pressions et les obstacles.


