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Économies

Or du Sénégal : vers un contrôle étatique renforcé

Alors que l’or du Sénégal s’écoule chaque année par des voies clandestines, le président Bassirou Diomaye Faye décide de reprendre les rênes du métal jaune. 

Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a instruit mercredi pour la mise en place effective d’un Comptoir national de commercialisation de l’or, qualifié d’« impératif de souveraineté ».  Une directive qui intervient dans un contexte d’exportation clandestine massive ayant coûté au pays entre 2,38 et 2,71 milliards de dollars en dix ans.

Selon le communiqué du Conseil des ministres du 12 novembre, le chef de l’État a demandé au ministre en charge des Mines de veiller « à l’exploitation optimale des ressources aurifères nationales, avec la mise en place effective d’un Comptoir national de commercialisation de l’or ».

Cette injonction présidentielle résonne particulièrement face aux révélations d’une étude de l’ONG suisse SWISSAID publiée en octobre 2024, qui démontre qu’entre 2013 et 2022, 36 à 41 tonnes d’or ont été illégalement sorties du Sénégal, soit 3,6 à 4,1 tonnes exportées clandestinement chaque année.

Une hémorragie financière massive

Le rapport de SWISSAID révèle que ce flux non déclaré, issu principalement de l’extraction artisanale et à petite échelle (EMAPE), transite par le Mali avant d’atteindre les Émirats arabes unis. La proximité de la région de Kédougou avec la frontière malienne facilite les transactions auprès d’acheteurs indépendants maliens, qui proposent des prix plus attractifs que les comptoirs agréés par l’État sénégalais.

Selon un propriétaire de comptoir d’achat interrogé en 2021 par l’Institut d’études de sécurité (ISS) et le Centre des hautes études de défense et de sécurité (CHEDS), seuls 10 % de l’or artisanal transiteraient par les comptoirs agréés par l’État.

L’étude révèle des écarts importants entre les volumes d’or produits et exportés. En 2021, une différence de 2,95 tonnes a été constatée entre les chiffres d’exportation officiels et ceux rapportés par les pays importateurs, une situation expliquée par la contrebande autour de l’or issu de l’EMAPE.

Une taxe controversée

La part de l’or artisanal qui rentre dans le circuit formel au Sénégal aurait fortement diminué au cours des dernières années, à cause de l’introduction en 2018 d’une taxe à l’importation de 4 %, l’une des plus élevées de la sous-région, selon le propriétaire du comptoir interrogé.

En 2022, la production industrielle d’or au Sénégal a atteint 14,9 tonnes, tandis que l’exploitation artisanale, estimée entre 4 et 4,5 tonnes par an, reste largement sous-déclarée. Les exportations officielles s’élevaient à 18,31 tonnes, principalement vers la Suisse, l’Australie et les Émirats.

L’or constitue actuellement la principale production minière du pays. Selon le rapport du Comité national ITIE publié en mai, la production d’or s’est établie à 106 579 onces troy au premier semestre 2024 pour une valeur estimée à 154,46 milliards FCFA. Les exportations d’or ont atteint 137,22 milliards FCFA sur la même période, représentant 29,29 % des exportations du secteur extractif.

Transformation locale et développement territorial

Au-delà de la souveraineté sur l’or, le président Faye a réaffirmé mercredi son attachement au développement territorial durable des zones d’exploitation minière, rappelant au gouvernement « la nécessité de poursuivre l’activation efficiente du Fonds de réhabilitation minier et du Fonds de développement des collectivités territoriales ».

Le chef de l’État sénégalais a également souligné l’importance qu’il accorde « au renforcement de la transformation locale » des ressources minières et « à la consolidation d’une industrie minière dynamique, fer de lance de la stratégie industrielle du Sénégal ».

S’agissant du projet de pôle industriel de Matam, le président a rappelé au Premier ministre « l’urgence de programmer le lancement du nouveau pôle industriel minier de la région de Matam, autour d’une meilleure valorisation des phosphates de Ndendory ».

Par ailleurs, le président Faye a indiqué au gouvernement la nécessité de veiller « à la maitrise stratégique de l’actionnariat de l’État dans les entreprises minières privées » et d’« accélérer la restructuration des sociétés publiques à l’instar de la SOMISEN et de la MIFERSO ».

Le communiqué fait également état de la demande présidentielle d’« actualiser régulièrement la cartographie des ressources minières » et d’« assurer une veille permanente sur l’ouverture et la gestion concertée des carrières ».

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