Dans un contexte de tensions politiques et sécuritaires sans précédent, le président malgache Andry Rajoelina a dissous lundi l’Assemblée nationale, avant de quitter le territoire national, invoquant des menaces contre sa vie. Cette décision intervient après une mobilisation populaire massive et une tentative de prise de contrôle des médias publics par des militaires.
Le président malgache Andry Rajoelina a signé lundi un décret portant dissolution de l’Assemblée nationale, dans la foulée d’un discours nocturne au cours duquel il a affirmé avoir quitté Madagascar pour assurer sa sécurité, au lendemain d’une mobilisation populaire massive réclamant son départ.
Le décret daté du 14 octobre 2025 et dont APA a obtenu copie, dissout l’Assemblée nationale conformément à l’article 60 de la Constitution. Cette décision radicale intervient après une journée marquée par une tentative de prise de contrôle des médias publics par un groupe de militaires et un climat de forte tension politique dans la capitale.
« Conformément aux dispositions de l’article 60 de la Constitution, l’Assemblée nationale est dissoute », indique l’article premier du décret signé à Antananarivo. Le texte précise qu’en raison de l’urgence, le décret entre « immédiatement en vigueur dès sa publication par émission radiodiffusée et/ou télévisée, indépendamment de son insertion au Journal Officiel de la République ».
Selon le document officiel, le président Rajoelina a pris cette décision après avoir informé le Premier ministre et consulté les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, comme l’exige la Constitution. Cette dissolution ouvre la voie à de nouvelles élections législatives dont les modalités et le calendrier restent à définir.
Sur le réseau social X, le président a justifié sa décision : « J’ai décidé de dissoudre l’Assemblée nationale, dans le respect de la Constitution. Ce choix s’impose pour rétablir l’ordre au sein de notre Nation et renforcer la démocratie. Le Peuple doit être à nouveau entendu. Place aux jeunes »
Appel au dialogue et rejet de la démission
Dans son allocution prononcée dans la nuit de lundi à mardi, initialement prévue à 19h mais retardée de plus de deux heures, le président Rajoelina a appelé au respect de la Constitution et au dialogue national. Il a catégoriquement rejeté toute idée de démission, tout en assurant qu’il demeurait à la tête du pays.
Le chef de l’État malgache a indiqué qu’il se trouvait en mission à l’étranger pour assurer sa sécurité, face à ce qu’il a qualifié de « complot préparé depuis plusieurs semaines pour attenter à sa vie ». Selon RFI, il aurait été exfiltré par la France dans le cadre d’un accord avec le président Emmanuel Macron, transité par La Réunion.
Andry Rajoelina a également dénoncé les rumeurs faisant état d’une fuite, affirmant qu’il « n’abandonnerait jamais Madagascar ». Il a mis en garde contre toute solution de crise en dehors du cadre constitutionnel, estimant qu’une telle voie risquerait de compromettre les projets de développement en cours et les financements internationaux.
Tentative de contrôle des médias publics
Ces événements font suite à une journée de tensions sécuritaires. Plus tôt dans la journée, la présidence avait dénoncé un « acte grave portant atteinte à l’ordre constitutionnel » après qu’un groupe de militaires eut tenté de prendre le contrôle des médias publics. Le chef d’état-major des armées, le général Démosthène Pikulas, s’est aussitôt rendu sur le site pour coordonner l’intervention des forces loyalistes et « rétablir la situation », selon la présidence.
Le colonel Mikaël Randrianirina, du Capsat, a nié toute tentative de coup d’État, déclarant à la presse qu’il n’était qu’un « officier exécutant » et que « l’armée avait simplement répondu à l’appel du peuple malgache ».
Mobilisation populaire sans précédent
L’intervention du président intervient au lendemain d’une mobilisation populaire sans précédent sur la Place du 13 mai à Antananarivo, où des milliers de citoyens, rejoints par des membres des forces armées, ont réclamé son départ et des réformes institutionnelles.
Le rassemblement, conduit par des mouvements citoyens et la jeunesse regroupée au sein de Gen Z Madagascar, a également vu la présence de figures de l’opposition, dont l’ancien président Marc Ravalomanana et l’ex-président du Sénat Rivo Rakotovao.
Le président Rajoelina a enfin appelé les acteurs politiques et la société civile à « préserver l’unité nationale et la paix », réaffirmant son ouverture au dialogue.
Selon le décret présidentiel, la décision de dissolution a été prise après information du Premier ministre et consultation des présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. Cette dissolution ouvre la voie à de nouvelles élections législatives dont les modalités et le calendrier restent à définir.


