Damien L., un ancien légionnaire devenu conseiller en sécurité pour une entreprise minière australienne, a été arrêté par la police burkinabé à Ouagadougou le 12 août. Depuis près de quinze jours, il est détenu au secret, sans possibilité de communication avec l’extérieur. Son arrestation a eu lieu alors qu’il était en mission pour une nouvelle rotation d’un mois au Burkina Faso, un pays où il travaille depuis 2020.
Officiellement, l'arrestation de Damien L. est liée à un problème de visa. Le 11 août, il était revenu au Burkina Faso pour une nouvelle période de travail, comme il le fait régulièrement depuis quatre ans. Cependant, les autorités burkinabé semblent avoir eu des raisons plus profondes pour son interpellation. En effet, Damien L., un homme dans la quarantaine et ancien membre du 2e régiment étranger de parachutistes (REP) en Corse, est désormais sous surveillance des services de renseignement burkinabés. Sa carrière passée dans la Légion étrangère et ses missions dans des zones de conflit (Haïti, Irak, Venezuela) attirent l’attention des autorités locales.
Lors de son séjour à Ouagadougou, Damien L. résidait à l’hôtel Lancaster, un établissement fréquenté également par des paramilitaires russes opérant au Burkina Faso. Les agents de la Direction de la sécurité de l’État (DSE) ont perquisitionné sa chambre d’hôtel ainsi que ses appareils électroniques, découvrant qu’il échangeait des informations sur la situation sécuritaire au Burkina Faso. Cette découverte a conduit les enquêteurs à suspecter Damien L. d’espionnage pour le compte de services de renseignement étrangers, notamment français.
Les autorités burkinabées ont transféré Damien L. dans une villa utilisée comme lieu de détention dans le quartier chic de Ouaga 2000. Certaines sources burkinabées le soupçonnent de collaborer secrètement avec les services de renseignement français, bien que ces allégations soient formellement démenties par plusieurs sources en France. Le Quai d'Orsay, contacté par Le Monde, a refusé de commenter cette affaire.
L'arrestation de Damien L. survient dans un contexte de tensions croissantes entre le Burkina Faso et la France, après l’arrestation début décembre 2023 de quatre agents de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) à Ouagadougou. Ces agents, accusés d'espionnage, sont toujours détenus et les négociations pour leur libération n'ont pas abouti. La situation de Damien L. est donc particulièrement préoccupante, car certains craignent qu'il ne soit soumis à une détention prolongée.
En parallèle, le capitaine Ibrahim Traoré, qui dirige le Burkina Faso depuis un coup d’État en septembre 2022, peine à rétablir la sécurité dans un pays en proie à des violences djihadistes depuis 2015. Le 24 août, une attaque majeure a eu lieu à Barsalogho, à environ 150 km au nord de Ouagadougou, faisant plusieurs centaines de victimes et attribuée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaida. Cette attaque souligne l'ampleur des défis sécuritaires auxquels fait face le pays.